DIS MAMAN, ILS SONT OU TES BOBOS ? - 30 ANS, 2 ENFANTS, 1 BOULOT ET... 1 CANCER
Extrait
Temps
38 ans, une vie qui file, bien remplie, un mari et deux magnifiques enfants, six frères et soeurs, six neveux, plein d'amis et un boulot passionnant... Que demander de plus ?
A la recherche du temps perdu
En 2010, ma vie de Parisienne était alors une course contre la montre, et à force de courir, je ne savais plus trop après quoi je courais... Mais le temps, en l'espace de neuf mois, s'est arrêté. Ma vie a basculé, mes points de repère ont été chamboulés, j'ai dû renoncer à ce que j'étais et reconstruire un nouveau moi.
Cette semaine-là commence comme toutes les autres. J'ai eu une journée bien remplie, entre trajets en voiture et rendez-vous avec des clients. De retour à la maison, c'est la «fenêtre de dispo» pour mes deux amours, Emma 8 ans et Mathis 1 an. Devoirs, câlins, dîner, boulot et coups de fil pour glaner des nouvelles de la famille. Avec ma soeur Mumu, j'évoque rapidement au détour de la conversation la présence d'un kyste dans un endroit qui n'appartient qu'aux femmes, mais bon, qui ne m'inquiète pas outre mesure. Mumu est médecin dans sa région lointaine d'adoption, la Côte d'Opale. J'ai un infini respect pour son choix de vie, hors du temps, d'être médecin de campagne
Cependant, Mumu appelle Laure, mon autre soeur, qui habite tout près de chez moi, dans l'ouest parisien. Laure, au-delà de notre relation particulière, c'est notre référence juridique depuis dix-huit ans, un concentré d'énergie du haut de son 1,68 mètre toujours rehaussé de talons. Débordée par son métier très prenant - elle a ouvert son cabinet d'avocats il y a neuf mois -, elle se démène pour s'occuper en parallèle de ses deux enfants encore à l'école maternelle, Manon et Thomas. Toutes deux s'attèlent à la lourde tâche de me faire prendre rendez-vous auprès d'un spécialiste. Mais je cours entre clients, conférences et réunions, et ne vois pas le temps passer. Trois jours plus tard, Laure m'appelle aux aurores et me propose de consulter un excellent gynécologue, le jour même, à l'heure du déjeuner. Après quelques hésitations, j'entends enfin l'inquiétude de mes soeurs et me décide à y aller... Je ne les remercierai jamais assez de s'être inquiétées à ma place. Quatre heures plus tard, j'obtiens grâce au médecin un autre rendez-vous, au centre de mammographie, rue Cardinet dans le 17e arrondissement. Une salle d'attente bondée, des personnes au teint blafard attendent la sanction ou plutôt le diagnostic. L'atmosphère de la pièce donne froid dans le dos. Cancer ou pas cancer ? Rémission ou remise au pot ? Les questions que se posent toutes ces femmes planent, indicibles et si présentes à la fois. Je suis appelée par le Dr J. à le rejoindre dans la petite salle d'examen. Il vient de regarder la mammographie réalisée par son assistant. L'échographie ne donne pas grand-chose et il devise tranquillement avec moi. Nous parlons de vacances, de soleil, du Sud-Est et du village des Lecques près de Bandol dont il est originaire. Soudain, alors qu'il m'examine, son visage se transforme, il vient de la sentir... La «banane», qui tait encore son nom, est bel et bien présente, nichée dans la partie inférieure de mon sein droit. Son verdict est sans appel :
«Je ne le sens pas, me dit-il.